15 Octobre 2022

C'est un jour d'automne comme je les aime. Frais mais pas pluvieux. De quoi faire de belles photos. Je me demande bien quels seront mes modèles du jour. Je ne choisis pratiquement jamais à l'avance ce que je vais faire. Sauf bien sûr quand j'ai un travail précis pour les cours et le club photo. Mais je considère que les meilleures photos de mon album sont celles où j'ai réussi à capter un instant parfait, une scène simple mais qui révèle beaucoup de choses. Une petite fille avec son chien, un jeune couple très amoureux, un étudiant plongé dans sa lecture... Toutes ces scènes du quotidien paraissent banales aux yeux de tous, mais pour moi, elles sont tout simplement parfaites... Alors oui, c'est vrai, prendre les gens en photo sans leur demander leur accord, ce n'est clairement pas... sympa. Mais ce n'est pas comme si je postais ces photos ou que je les modifiais pour en faire des rumeurs. Quelqu'un fait ça à Indarë. D'ailleurs, j'ai déjà entendu des chuchotements à mon sujet. Avec mon appareil photo constamment autour du cou, on me soupçonne parfois d'être ce photographe mystère. Mais son travail ne me plait pas.

Personnellement, je me plais à croire que les photos que je prends reflètent le meilleur des gens. Je mets en lumière des scènes et les embellis ou fais ressortir un petit truc mais qui rend le cliché exceptionnel. Pas besoin d'artifices, pas besoin de modifier complètement les photos. Un petit ajustement de lumière pour mettre en avant ceci ou cela. Un contraste des couleurs pour faire ressortir une personne. Rien qui dénature complètement la photo, juste embellir le sujet. Je veux que si un jour quelqu'un voit mes clichés, il se dise : Ouah, la scène a été captée au bon moment, le sujet est parfaitement mis en avant, ni trop ni pas assez. Mais je suis bien trop timide et effacée pour montrer mes photos. Elles restent dans mon album ou sur mon ordinateur. Les seules que mes colocataires aient déjà vu, ce sont celles que j'accroche au dessus de mon lit. Mais ce sont des paysages ou des animaux que j'ai pris au détour d'une rue, entre deux cours. Je ne montre pas les clichés que je fais des personnes que je croise.

Aujourd'hui, j'ai décidé de me rendre à l'université. J'ai envie de me trouver une salle pour danser, dans ma bulle, loin de l'agitation du lycée. L'année n'a pas commencé depuis très longtemps et voilà que je veux déjà m'échapper. Je crois que j'ai hâte d'être à l'université, il y a moins de monde déjà. Je m'arrête sur un banc en plein milieu de mon trajet. J'ai envie de prendre une photo, l'ambiance s'y prête parfaitement. Je m'assois donc et observe tout autour de moi, appareil photo en main. Et là, j'aperçois celui qui va être mon modèle du jour. Je crois l'avoir déjà vu à l'université durant l'une de mes escapades. Il est en train de courir. Un jogging, une scène du quotidien, un cliché parfait. Je m'arme rapidement et appuie sur le bouton qui capturera la scène du jour. J'en prends plusieurs d'affilée pour pouvoir faire du tri et ne garder que les plus belles photos. Je baisse d'ailleurs mon appareil pour déjà faire un premier tri entre les photos flous ou non cadrées, sans faire attention au monde qui m'entoure.

J'étais dans ma bulle alors que je triais les photos que je venais de prendre. Si bien que je n'entendis pas la personne qui m'approcha en sprintant et qui m'arracha mon appareil des mains. Un petit cri paniqué m'échappa alors que je regardais celui qui avait fait ça. C'était celui que je venais de prendre en photo ? M'avait-il vu ? Il semblait pourtant si concentré dans son jogging et moi, je suis très discrète. Comment a-t-il réussi ? Ai-je fait une erreur ? Toutes les questions se bousculaient dans ma tête.

Son ton calme me fit revenir sur terre pour que je puisse lui répondre. J'étais d'ailleurs très étonnée qu'il s'adresse à moi si ... gentiment ? Je m'étais de nombreuses fois imaginée ce que dirait quelqu'un qui me voyait en train de le photographier et ça ne se finissait jamais bien pour moi. A vrai dire, j'avais plus peur de ce qu'il pourrait faire à mon appareil photo plutôt qu'à moi. Je me fichais qu'il me fasse mal. Les blessures physiques, ça guérit. Mais cet appareil, c'est toute ma vie.

"Je suis désolée !"

Ma petite voix sortit enfin quelque chose pour lui répondre et éviter une catastrophe. Mais je savais très bien que ça ne suffirait pas. Comment est-ce que je pouvais justifier ce que je faisais ? Pour moi, je ne faisais rien de mal. Je ne faisais que prendre des photos de scènes du quotidien. Mais ça pouvait être très mal interprété. Surtout avec le photographe mystère qui diffusait des photos étranges des étudiants.

"Ce ne sont pas... les gens que je prends en photo. Plutôt la scène en elle-même. Je supprimerai ta photo si ça te dérange !"

Je devais me faire violence pour qu'il m'entende. Je n'avais pas une voix très forte de base mais alors là, le niveau sonore était encore plus faible vu que je commençais à paniquer.

"Je prends tout en photo à vrai dire... J'aime bien utiliser la photographie pour embellir une scène du quotidien qui paraitrait normale à d'autres yeux..."

Je baissais le regard, n'osant soutenir le sien. Je sais que je suis en tort et il aurait tout à fait le droit de m'en vouloir et d'être en colère. Mais j'espérais que lui dire que je supprimerais sa photo s'il préférait suffirait à ce qu'il me rende mon appareil sans l'abîmer...

Il me fixa alors que je m’excusais. Je baissais le regard, je n’aimais pas affronter celui des gens. Certains prennent ça pour une attaque qu’on les regarde dans les yeux, et je ne cherche pas le conflit. J’étais prête à lui dire tout ce qu’il voulait savoir, pourvu que mon appareil reste en un seul morceau. Et moi avec, si possible.

« Liv Eriksson. »

Je ne savais pas ce que mon nom pouvait lui apporter de plus. Je ne le connaissais pas. Il avait l’être d’être à l’université. Je me risquais à le regarder pour essayer de voir si vraiment on se connaissait. Son visage me sembla familier et, en fouillant dans ma mémoire, je me rendis compte que je l’avais déjà pris en photo par le passé. Mais il me semblait que ça remontait à quelques années déjà…

Je sursautais lorsque ma réponse ne lui plut pas. Pitié, ne me frappe pas… J’essayais de remettre de l’ordre dans ma tête pour lui répondre et faire en sorte que cette réponse ne m’attire pas d’ennui. Je lui dirai de toute façon la vérité. Je n’aimais pas les mensonges, encore moins ceux par omission. J’avais toujours été honnête et s’il y a bien une chose que je ne veux pas changer en moi, c’est ça.

« Je crois que oui, peut-être une fois, dans mes premières années ici… »

Je baissais à nouveau ma tête, me recroquevillant légèrement, pour être prête à encaisser s’il lui venait l’envie de me frapper. Mais rien ne vint. Alors je me risquais à nouveau à le regarder et je vis qu’il s’était un peu détendu. Je repris une position plus détendue à mon tour. J’acquiesçai doucement de la tête à sa première question.

« Je vais à Indarë, depuis quelques années… »

C’est vrai qu’aujourd’hui, je me baladais sans mon uniforme. C’était un jour où je n’avais pas classe. Alors pour éviter d’être stigmatisée, encore, je l’enlevais pour me balader en dehors de l’école. Surtout qu’avec ma couleur, on ne pouvait pas savoir de quel groupe je faisais partie mais on savait que j’étais à l’IRS. Et c’est généralement mal vu…

« Tu as… d’autres questions ? »

Si ça pouvait l’apaiser et lui faire comprendre que moi non plus, je ne lui voulais pas de mal avec mes photographies. Je devrais peut-être lui dire directement en fait ? Allez Liv, un peu de courage…

« Je ne veux pas te blesser non plus… Je n’ai rien à voir avec la personne qui divulgue des rumeurs à l’école… »

Je ne savais pas s’il allait me croire, mais au moins, je lui avais dit de moi-même.

Je ne dis rien alors qu’il regardait mes photos. Je n’avais rien à cacher alors il pouvait bien fouiller un peu. Il ne verrait que des photos de paysages, d’animaux ou de personnes dans une scène banale. Le sourire qu’il fit en voyant une de mes photos me fit sourire. C’était ce genre d’émotions que je voulais faire ressentir aux gens avec mes clichés. Peut-être qu’un jour, je pourrais exposer mes photos aux yeux de tous, pour illuminer leur journée rien qu’en les regardant.

Je fus rassurée de voir qu’il ne pensait pas que je pouvais être le photographe mystère. Mais alors… De quoi avait-il peur ? Car avoir peur d’être suivie, pour une raison ou pour une autre, c’était toujours angoissant. Mais ça ne me regardait pas…

« Ce n’est pas grave, ta réaction était légitime… »

Je récupérais mon appareil avec un sourire, repassant la lanière autour de mon cou pour le garder près de moi cette fois.

« Merci… Désolé de t’avoir fait peur en tout cas. »

Je jetais un œil à la photo restait ouverte quand il me complimenta. Je n’avais pas l’habitude de recevoir des compliments en général et ça me fit rougir.

« Merci… Je ne compte pas arrêter, j’aime trop ça. »

La photographie est bien trop importante dans ma vie pour que je songe à arrêter un jour. Je le suivis du regard alors qu’il s’installait dans l’herbe. Je me tournais sur mon banc pour lui faire face, l’écoutant parler.

« Oh d’accord ! Euh… Non. Désolée, je ne sais pas qui tu es… Mais je fuis les rumeurs alors… J’ai peur… de tomber sur une qui pourrait parler de moi… »

Et je me passerai bien de ça. Les rumeurs, les mauvais traitements, les moqueries… Je ne veux pas revivre tout ça. Je ne suis pas sûre de pouvoir y survivre. Je me reconcentrais sur l’étudiant face à moi, qui avait fermé les yeux. Il était beau… Mes mains s’étaient posées d’instinct sur mon appareil mais je me retins.

« Assez oui, depuis que j’ai l’âge d’avoir un appareil sans avoir peur de le casser. Le collège je dirais. »

Ce mot m’arrache un frisson. Seule la dernière année avait été horrible. Mais le mot collège ne faisait écho qu’à cette année. Je n’arrivais pas à me rappeler de bons moments durant cette période…

« Dis-moi… Ca te dérange si je te prends en photo ? »

Cette fois, j’avais eu le courage de lui demander. Mais je savais que cette scène pouvait durer le temps que je prenne un cliché. Certains moment méritent d’être immortalisé sur l’instant. Aller demander l’autorisation revenait à casser ce moment et la magie ne serait plus la même…

L'ambiance semblait s'être allégée une fois qu'il avait compris que je ne le suivais vraiment pas et que je l'avais pris en photo par hasard. La photographie était ma passion depuis longtemps alors dès que je le pouvais, je pratiquais. Peut-être qu'il avait une passion comme ça qu'il pratiquait régulièrement ? Je souris à sa phrase, j'étais contente qu'il ne m'en veuille pas, c'était ma crainte avec mes photos en général.

"Oh je vois... Je suis désolée pour toi..."

J'avais tendance à prendre beaucoup les émotions des autres sur moi, quand une conversation se passait bien. Et c'était le cas avec...

"Au fait, quel est ton nom ?"

Je lui avais donné le mien tout à l'heure, mais je ne connaissais pas encore le sien. J'aimais bien mettre un nom sur les visages que je voyais régulièrement. On arriva ensuite sur le thème des rumeurs. J'en avais eu pas mal à mon sujet dans mon ancienne école. Ce qui avait entrainé des moqueries et ce qui en découlait ensuite... Alors oui, quand j'avais appris qu'il y avait des rumeurs à Indarë, j'avais fait en sorte de les fuir.

"Oui, je préfère faire comme si elles n'existaient pas..."

Entre les rumeurs et les photos, j'avais peur. Peur que ça recommence... Je secouais la tête pour revenir à moi. Il n'était pas temps de ressasser le passé. Pour une fois, j'arrivais à discuter avec un étudiant sans avoir peur de ce qu'il pourrait dire ou me faire. Il fallait que je saisisse cette chance. Peut-être que pour une fois, j'allais réussir à me faire un ami.

Il se releva instantanément quand je lui demandais si je pouvais le prendre en photo. Aie. Je n'aurai peut-être pas dû revenir sur ça... Mais il n'était pas en colère. Plutôt gêné. Je pouvais comprendre. Je souris à mon tour, relâchant mon appareil photo que j'avais pris dans mes mains. Il resta accroché autour de mon cou.

"Tous les sujets peuvent être intéressants à mes yeux. La scène méritait d'être immortalisée. Mais je peux comprendre ton sentiment. Je préfère être derrière l'appareil photo. Je ne le ferais pas, si tu ne veux pas."

Je lui avais demandé, il n'était pas à l'aise avec ça et j'allais respecter son choix. Je n'aimerai pas qu'on me force à faire une chose qui ne me plaisait pas alors je n'allais certainement pas le faire avec quelqu'un.

Il s'était adouci, je m'étais détendue. Il avait l'air souvent sur ses gardes. Chacun a sa manière de réagir. Lui il est direct, moi je me tapis et je fuis, j'imagine. Je lui souris à mon tour.

"D'accord. C'est pas agréable d'être la cible des rumeurs... Mais je n'y prêterai pas attention. Enfin, si je vois ton nom, je ne m'en occuperai pas."

Je pouffais légèrement à sa remarque.

"Très bien. Mais tu sais... Je ne préviens jamais..."

Il était à nouveau installé, les yeux fermés, et cette fois je n'attendis pas pour le prendre. Alors que je faisais du tri dans tous mes clichés pour ne garder que les meilleurs, je vis des ombres au-dessus de moi. J'étais au bout du banc, alors je me levais pour reculer face aux trois garçons.

"L... Laissez-moi..."

Chris se leva automatiquement. Sa voix avait radicalement changé. Et moi je tremblais de peur. Pourquoi ? Pourquoi on ne pouvait pas me laisser tranquille ? Alors que l'un d'eux s'avançait vers Chris, j'en profitais pour reculer encore un peu, me retrouvant dans l'ombre du garçon. Sauf que l'un des deux qui restaient me vit reculer et me rattrapa au niveau du poignet et serra pour ne pas que je m'enfuis.

"Aïe !
-Reste là toi !"

Chris explosa sa branche sur la tête du premier et un cri m'échappa en le voyant s'effondrer. Je fus relâchée pour qu'ils puissent s'attaquer à Chris. Je reculais encore plus et m'accroupis derrière le banc en tremblant. Je mis mes mains sur mes oreilles, je ne voulais pas entendre ce qui allait se passer ensuite. J'avais peur. Peur que ça recommence.

Je réussis tout de même à entendre Chris qui s'adressait à moi, d'une voix beaucoup plus calme. Il était tellement différent de celui qui venait de mettre au tapis les trois agresseurs. Je relevais la tête vers lui, encore tremblante. Je me relevais doucement, m'aidant du banc. Je regardais autour de nous, voyant les trois jeunes au sol, assommés. Je me frottais le poignet où l'un des agresseurs m'avait attrapée et serrée. J'allais être rouge.

"N..non, ça... va. Je crois..."

Ma voix tremblait encore, je tentais de retrouver une respiration moins chaotique mais je n'y arrivais pas. J'étais en train de faire une crise... Je voyais flou, j'avais des flashbacks du collège. Je me tenais au banc, de peur de tomber. Pitié, que ça s'arrête...

Trop de violence, de contacts, de peur en moi... J'allais finir par rester enfermée dans ma chambre. J'ai l'impression d'être constamment en danger dès que je sors de l'environnement de l'école. Et à Indarë... Pour le moment, je n'ai pas encore eu trop de problèmes mais je reste souvent dans mon coin et je me fais discrète. Le conflit s'arrête assez rapidement car Chris les met facilement à terre. Et il redevient aussi doux que lorsqu'on parlait juste avant. Je n'arrive pas à me calmer mais je lui fais assez confiance pour prendre sa main et le laisser me guider jusqu'au banc. Je me triture les mains, le regard baissé alors qu'il fouille dans son sac.

"Merci..."

Ma main tremble toujours quand je prends la bouteille mais, au moins, j'arrive à ne pas la lâcher. Je bois doucement et l'eau me fait du bien. J'évite de regarder les trois qui sont toujours au sol. J'entends qu'il me propose de nous éloigner et j'acquiesce doucement. Ca m'aidera peut-être à ne plus y penser plutôt que de rester exactement à l'endroit où tout ça s'est déroulé.

Je le suis en silence alors qu'il s'éloigne du banc. Je presse le pas pour tenter de rester à sa hauteur. Il est plus grand que moi, ce n'est pas difficile pour lui de marcher plus vite que moi. Ce silence est gênant mais je n'arrive pas à parler. Et je pense que ma petite crise n'a pas dû le mettre à l'aise.

"Euh... Oui, c'est ça. Je fais partie... du club de photographie..."

Il est nerveux, moi aussi, cette conversation est vraiment étrange... Il a l'air gentil mais là actuellement, je crois que j'ai juste envie de me cacher dans un trou de souris le temps de calmer, de retrouver une respiration assez stable et de chasser les images de ma tête. Je suis surprise de sa question. Il veut toujours qu'on discute ? Je secoue la tête.

"Non... Je fais de la photo pour moi... et pour faire plaisir aux gens. Et puis... sincèrement... je crois que je n'oserai pas..."

Non, non. L'anonymat c'est très bien. Je ne veux pas me mettre en valeur. Je veux juste faire cette activité pour mon plaisir et pour ceux qui me le demandent éventuellement. Voir les sourires des étudiants quand j'imprime les photos que j'ai prises d'eux, ça me suffit largement à me rendre heureuse.

"Et toi ? Tu fais quoi à l'université ?"

Je souris timidement à sa proposition.

"Le club photo me permet déjà beaucoup... Mais qui sait, peut-être qu'un jour je pourrais... Quand ça ira mieux..."

Je gardais mon regard rivé vers le sol. Quand j'irai mieux... Est-ce qu'un jour, j'y arriverai ? Est-ce qu'un jour, j'arriverai à surmonter tout ça ? Je n'en savais rien. Mais je faisais tout pour. La photographie et la danse m'aidaient beaucoup. Mais j'avais encore beaucoup de chemin à parcourir.

"Oh ! Génial. J'aimerai beaucoup t'entendre... si tu me le permets bien sûr. Et promis, je ne te demanderai pas si je veux te prendre en photo... On en apprend tous tous les jours, je suis sûre que tu te débrouilles très bien."

Je lui fis un petit sourire encourageant. Sourire qui s'évanouit bien vite quand j'entendis du bruit derrière nous et que, en suivant le regard de Chris, je vis les mêmes types que tout à l'heure. Mon cœur s'accéléra à nouveau alors qu'il me poussait doucement derrière lui, pour me protéger. L'atmosphère est pesante. Pourquoi étaient ils revenus ? Pourquoi fallait il qu'ils se battent ...? Je reculais instinctivement en regardant l'échange. Tout ça allait mal finir... Un petit cri m'échappa quand je sentis que quelqu'un prenait mes bras pour les mettre dans mon dos et qu'il posa un couteau sous ma gorge. Je sentis le métal froid qui s'appuyait contre ma peau. Des larmes se mirent à couler le long de mes joues.

"Chris...

- Ferme la !"

Le musicien se tourna vers nous. Je plantais mon regard terrifié dans le sien, glacial. Il était redevenu comme avant, comme quand il s'était déjà battu avec eux. Mais je n'avais pas peur de lui, il ne m'avait rien fait. Par contre, j'avais vraiment très peur de ce que l'autre pourrait me faire. Je sentis la lame qui s'appuyait à nouveau sur ma gorge lors de leur échange. Je sentis alors qu'elle avait légèrement entaillé ma peau et que quelques gouttes de sang s'en échappaient. Je fermais un instant les yeux alors que les larmes continuaient de couler le long de mes joues, silencieusement.

D'un coup, il relâcha mes bras et me poussa contre Chris. Je me cognais contre lui, mes mains sur son torse. Je reculais alors d'un pas, gênée.

"Je... Je suis désolée... Je ne voulais pas... te rentrer dedans..."

Je relevais mon regard vers lui, essayant d'essuyer difficilement les larmes, qui ne cessaient de s'écouler, avec mes mains. Je tentais de me calmer, essayant de retrouver un rythme normal de respiration. Mais je n'y arrivais pas. J'avais eu un trop plein d'émotions en très peu de temps.

"M... Merci, ça fait deux fois que... tu me sauves... Je te suis redevable..."