Le repas du midi. Kasumi n'était pas encore très habituée à avoir un large temps pour pouvoir bien manger, avant d'être incarcérée, elle prenait surtout des petits trucs à manger. Autant dire que même si le repas de ce midi ne donnait pas forcément envie, elle avait le choix, prenant de quoi constituer un plat équilibré. Elle allait se poser dans un coin, quand son regard se portait sur un groupe de lycéens, ressentant quelque chose, leurs attitudes étaient clairement suspectes, elle voyait leurs regards sur une élève blonde, plissant des yeux et venant à se mettre à la table derrière eux, furtivement.

Il ne fallut guère longtemps pour les entendre parler de voler la peluche et de le planquer près d'un point d'eau, une attitude puérile qui fit naître l'envie de mettre des bâtons dans les roues de leur plan. Kasumi soupirait, pensant que son repas n'allait pas être de tout repos, se levant et venant à se mettre sur le côté de la table, avant de lever son pied et le poser sur la table, prenant appui dessus, prenant une posture peu féminine et qui en aurait fait rougir plus d'une, vu que l'on pouvait sans doute voir sous sa jupe. Kasumi prit un ton menaçant.

- Dites les branleurs, si vous n'avez pas les couilles d'agir seul, vous attaquez pas à des cibles faciles, sinon vous allez perdre des dents. C'est compris ?

- Qu'est-ce qu'il veut le pd ?!

Le groupe se mit à encercler Kasumi, qui ne se démontait pas. Elle savait que même si cela devait arriver au poing, elle était agile et endurante, pas le genre de personne à mettre facilement à terre, d'autant qu'en exposant leurs plans, le groupe aurait validé ses dires.

- Allez-y, frappez moi, il y a des témoins. Maintenant vous avez le choix, vous battre, rester et bouffer ou encore vous barrer.

Elle prit un ton tout bas pour que seul le groupe puisse entendre.

- En d'autre mot, fractures, humiliation ou intelligence.

Le leader du groupe ouvrit la bouche avant de se raviser. Kasumi vit le groupe faire le troisième choix, renversant son plat au passage.

Une fois l'échauffourée passée, elle prit ce qui pouvait être sauvé de son repas, nettoyant les pertes, constatant qu'il ne restait que son entrée et son dessert, autant dire que ce midi le repas allait être maigre. Kasumi poussa un soupire.

- Je ferais pas ça tout les jours.

Elle s'approche de la blonde et se poser à sa table sans réellement demander l'autorisation. Kasumi se mit à une place en face, posant son plat un brin vide.

- Salut, fait gaffe au groupe qui vient de partir. Ils prévoyaient d'embarquer ta peluche, rien ne dit qu'ils tenteront plus tard. Au fait, moi c'est Kasumi, je suis nouvelle, j'ai débarqué au début du mois. Tu leurs a fait quelques choses où ils sont tout simplement débiles ?

Le midi, la pose la plus importante de la journée ! Qu’est-ce que tu ferais sans nager ? Tu ne manges pas beaucoup, c’est vrai, tu es assez mince, mais tu n’es plus en risque d’être en insuffisance alimentaire. La première fois que tu as mangé ici tu as failli vomir. Il faut dire que tu avais beaucoup trop mangé et que ton père... ne te nourrissait pas beaucoup. Enfin bon, tu galères à couper la viande, avec ton couteau en plastique. Il y a bien une raison pour laquelle tu n’as pas le droit à tout ce qui est coupant ou tranchant en métal. Ton père est la raison d’ailleurs. Mais la n’est pas la question. Tu profites de ton repas dans cet uniforme que tu aimes moyennement. Heureusement, tu as monsieur Lapin ! Qu’est-ce que tu ferais sans lui ? Bon, il n’est pas à table, sa tête dépasse simplement de ton sac, mais c’est tout comme. C’est qu’il faut faire attention pour ne pas qu’il se tache. C’est aussi une des raisons pour laquelle tu manges seule, en partie pour être calme, en partie parce que certains savent que tu peux t’énerver pour rien. Tu es souvent puni pour ça, d’ailleurs. Enfin, bon... L’autre elle te surprend un peu en débarquant d’un coup, comme ça.

"De quoi ?"  

Le groupe ? Tu te retournes pour voir qui c’est. Ah, eux.

"Ils comptaient vraiment faire du mal à monsieur lapin ?"  

Tu vois rouge. Ça te met en colère et ça s’entend. Toucher à monsieur Lapin, c’est dangereux. Tu les auras entendus, tu les auras frappés, direct. Pas de pitié avec les vilains !

"Je m’appelle Mino. On est dans la même classe, non ?"  

Une nouvelle... pourtant elle a un peu une voix de garçon. Tu as parfois eu cette impression, non ? Ou c’est la fatigue.

"Ce sont des crétins. Tous les garçons s’amusent qu’a nous embêter."  

Tu ne mâches pas tes mots quand on parle des mâles. Tu es très misandre. Il y a de très rares exceptions, c’est vrai. Christ, par exemple. Mais c’est un détail.

Kasumi pensait que Mino était le genre de fille à avoir deux de tension, en entendant le « De quoi ? » , pensant comprendre un peu le pourquoi elle avait été une cible, ne faisant que monter un peu d'un cran l'idée que ce groupe était des froussards.

Face à la question concernant la peluche, supposant que ce nom était lié à la chose, la lycéenne à la chevelure blanche se contenta de hocher positivement de la tête.

Kasumi écoutait la représentation de Mino.

* Mino, Mino, cela me dit quelque chose en effet. *

La lycéenne répondit avec un sourire amical.

- C'est certainement le cas, je suis nouvelle, je n'ai pas encore mémorisé tout le monde.

En entendant la remarque sur les garçons et la généralité qui était faite par Mino, Kasumi ne répondit pas tout de suite, venant un peu à manger son entrée, à base de crudité, voyant le couteau en plastique et la viande qui semblait plus charcutée que coupée. La lycéenne finit sa bouchée, avant de prendre la parole.

- Ce sont leurs éducations qui veulent cela, même si cela ne justifie pas leurs stupidités. Mais parlons d'un autre sujet, tu veux bien ? Tu sembles avoir du mal avec ta viande, tu veux que je te montre une méthode pour bien couper avec ton couteau ?

Kasumi s'était très vite fait aux couverts, ayant trouvé sa méthode. Non pas que parler des garçons la dérangeait, juste qu'elle avait conscience qu'avec son éducation, ses repères n'étaient pas les mêmes et qu'elle ne voulait pas paraître telle une extra-terrestre face à cette blondinette.

- Après c'est toi qui vois Mino, j'impose rien.

Nouvelle. C’est pour ça qu’elle ne te dit pas grand-chose. Tu es un peu individualiste et égoïste, soit tu es très (trop) proche des gens, soit tu oublies leur existence. Sauf tes ennemis bien sûr. Tu es trop vengeresse pour les oublier.

"C’est toute soif une excuse."  

Ton éducation est nulle, c’est tu es une jeune femme... non, pas du tout. Tu es la pire. Tu es une personne horrible et instable. Sinon tu ne serais pas ici.

"C’est bon, je gère."  

Tu gères aussi bien qu’une personne qui s’énerve stupidement sur sa bouffe avec un couteau en plastique.

"Et je vois que tu fais partit du gang toi aussi."  

Du gang qui a fait des trucs pas bien avec les objets coupants et qui n’a plus accès audits objets coupants. Tu te demandes rapidement comment va ton père. Mal, tu espères.

"Et du coup, ça va, pas trop bizarre d’être là ?"  

Monsieur Lapin reste de sortie, maintenant. Sur la table, à côté de toi. Il la surveille.

Kasumi était d'accord que cela n'excusait en aucun cas les actes des personnes. La jeune adolescente n'insista pas alors que Mino disait gérer, comme elle l'avait dit, elle n'imposait rien, même si elle doutait que la blondinette gère aussi bien que cela au vu de l'état de la viande.

Kasumi haussa un sourcil en entendant le terme « gang », venant à prendre quelques secondes avant de comprendre ce que sa camarade voulait dire. Hochant simplement sa tête de haut en bas.

La lycéenne entendit la question et observait monsieur Lapin, trouvant que cette peluche allait bien avec Mino, donnant un air candide à sa camarade, même si elle supposait que le couteau en plastique soulignait qu'elle était tout sauf un ange.

Kasumi se mit à répondre avec un sourire.

- C'est un peu bizarre de reprendre les cours et de revivre en communauté. Mais je vois ça comme un nouveau départ.

Elle en profita pour finir son entrée, avant de reprendre.

- Après, comme je suis encore nouvelle, j'ai pas encore discuté avec tout le monde, donc je ne sais pas encore qui me cherchera des problèmes et ceux qui seront de bon contact.

Son regard se posait sur la peluche.

- Il semble en bon état monsieur Lapin. Tu l'as depuis longtemps ?

Parler de la peluche semblait, pour Kasumi, un bon sujet de conversation, vue que Mino semblait beaucoup y tenir, même si elle se doutait que cela pouvait engendrer une longue tirade en mode "monsieur Lapin c'est le plus beau, c'est le plus fort, etc".

Tu te demandes si en plus du couteau en plastique, elle a aussi sa chambre, comme toi. D’un côté, c’est pratique, tu es tranquille et au calme. Surtout pour lire. De l’autre... bon, ta dangerosité est avérée. Tu te demandes un peu ce qu’elle a fait, mais au final, ça n’est pas ton problème.

"Ah ça c’est sur, ça fait bizarre."  

Tu l’as vécu, toi aussi. Après avoir été enfermée par ton père, retrouver un semblant de liberté... ça a fait bizarre. Très bizarre. Tes talents sociaux étaient au fond du trou. Tu as travaillé dur, et tu remontes la pente.

"Les autres diraient que je pose problème, je crois."  

Et ils ont raison. Caractère de cochon et petite patience donnent un combo explosif.

"Ah oui, c’est un cadeau de ma maman."  

Gros souvenir. Le dire à haute voix... tu as presque envie de pleurer.

"Alors j’y fais attention. Et je répare, monsieur, Lapin régulièrement."  

Tu tiens VRAIMENT à lui. C’est ta bouée de secours. S’il disparait, tu vas être véritablement perdue. D’ailleurs tu interromps ton repas pour le serrer contre toi. Oups.

Kasumi haussa légèrement un sourcil en entendant Mino dire qu'elle était une personne à problème selon les autres. Personnellement, la lycéenne ne trouvait pas en quoi elle était un problème, en écartant le fait qu'elle se trimbalait avec une peluche, mais il devait y avoir une raison à un tel comportement, même si l'adolescente à la chevelure blanche n'allait pas se permettre de fouiller plus loin que ça. La pauvre Kasumi ne savait pas de quoi était capable Mino et encore moins qu'elle avait un caractère bien trempé, pensant plus avoir affaire à une fille qui avait certainement besoin d'un peu de protection.

La lycéenne adressa un sourire tendre en entendant le fait que la peluche était un souvenir maternel. Kasumi n'avait pas de bien matériel de la sienne. Dire ne pas éprouver une certaine envie aurait été mentir, mais elle se doutait que si elle devait avoir un objet de sa mère, le souvenir de sa perte serait d'autant plus ancré au fond d'elle.

Elle sourit en entendant que cette peluche était souvent réparée, rien de plus normal, les objets ne peuvent pas durer dans le temps sans y faire attention. En observant Mino serrer son lapin, Kasumi ne put s'empêcher d'étouffer un rire, posant sa main gauche devant sa bouche pour tenter de cacher un peu sa réaction.

Cette scène était touchante, comme elle pinçait le cœur de celle à la chevelure d'albâtre. Touchante, car on voyait bien que cette peluche était très importante pour Mino, pinçant, car elle se doutait que Mino devait avoir vécu quelque chose de terrible pour agir de la sorte, osant quelques instants projeter sa vie sur celle inconnue de Mino, avant de se rendre compte qu'elle faisait quelque chose d'ignoble, sa vie ne pouvait être celle de Mino, comme Mino ne pouvait avoir vécu sa vie. Chaque vie avait ses chemins, ses fossés et ses ronces.

Kasumi se permit de rester souriante.

- Cela se voit qu'il s'agit d'une personne importante. Tu dois être très douée dans la couture du coup, non ?

Pour le moment, la lycéenne gardait un peu la maîtrise de cette conversation, trouvant que Mino ne ressemblait en rien à une délinquante, venant même à se poser la question si elle n'était pas une des victimes des erreurs de jugement.

Pourquoi elle rigole un peu ? Elle cse moque de toi et de monsieur lapin ? Si c'est le cas, ça va t'énerver vite, très vite ! Se moquer de ta peluche est une très mauvaise chose, c'est sur.

"Il est important. Et il est très gentil. Sauf quand on se moque de lui."  

Ce serait un garçon, monsieur Lapin le frappera déjà. Et par monsieur Lapin, ça veut dire que soit tu tapes directement avec la peluche (elle est plus solide qu'on le pense) ou que tu utilises les pattes pour frapper (ce qui est plus difficile, mais c'est quand tu es de bonne humeur, ça doit moins mal). Donc oui, ta phrase, c'est une menace. Ce qui se voit dans ton regard et ça s'entend.

"Je ne sais pas si douée est vraiment le cas."  

Tu apprends encore…

"Je sais réparer ma robe et mes tenues, mais pas vraiment plus. J'espère pouvoir en faire une un jour !"  

Tu en dessines, parfois. Mais ce ne sont pas de super design, il ne faut pas se mentir.

"Mais si jamais tu as des choses à rafistoler un jour, je peux le faire !"  

Autant aider les autres, non ? Il faut tenter, du moins. Et puis elle a l'air sympa.