L'être humain est pitoyable.
Plus que tout. Il est répugnant.

Une pauvre silhouette avance. Difficilement. Une autre la menace. De sa voix sévère. Pour rappeler qui domine. Ils avancent. En rond. Dans un dédale. Un piège concocté pour eux. Par leurs propres objectifs. L'une doit supprimer. Supprimer celui qui rêve de continuer de toucher le ciel. Et transformer une rencontre … en un spectacle pathétique. Mais le pathétique se regarde. Toujours. Car il est la base même de cette humanité crasse – artificielle ou naturelle. Du moins. En partie. Une base complexe. Une équation étrange. Qui permet tout de même de répondre à une question. Essentielle à tout. À quel point êtes-vous prêt à faire les choses qui vous sont essentielles ? Acceptez-vous de tomber ? Acceptez-vous de perdre tout ce que vous possédez, pour une seule chance ?

Celui qui est malade, dont la mort arrive pas à pas. Qu'a-t-il donc à perdre de tester le pire, pour tenter de survivre ? Du temps ? Ah. Mais ce temps, chaque jour, lui rappellera sa faiblesse. Au moins, s'il échoue … La tranquillité saura l'accueillir. S'il n'était pas prêt à perdre ? C'est qu'il a oublié que cette vie n'est qu'une longue succession de pari. Qu'un jour, tout le monde fini par perdre.
Même toi. Corbeau. Tu peux perdre. Non. C'est même plus précis que cela. Tu vas perdre. Un jour. Une nuit. Un hiver ou un Été. Tu sentiras cette liberté s'effriter sous tes doigts. Rien. Rien ne te sauvera. Et, ce jour-là. Tu finiras par comprendre. Tu es aussi pitoyable que T-Bug l'est en ce moment.

Les mains dans les poches, maintenant que tout danger est écarté, la silhouette à la tignasse blonde avance. Sa capuche relevée, il souffle dans son chewing-gum pour créer une bulle. Un pas rapide, alors qu'il traverse la rue. Pour simplement se retrouver de l'autre côté. Le Corbeau s'est envolé. Il ne reste plus que l'insecte. Rampant sur le sol. Ta première erreur. Ne pas avoir asséner l'ultime coup de bec pour rompre cette vie. Si elle est une menace, pourquoi ne pas la tuer ? Si elle te pousse à sortir une arme, pourquoi ne pas la finir ?

Une erreur.
Tu vois. Tu es comme les autres.
Tu veux parfois jouer avec une main trop faible.
Même si. Un bon bluff pourrait arranger ta situation.

La bulle éclate. Alors qu'il l'observe. Cette demoiselle, qui est au sol. Perdue dans son inconscience. « T'es pas vraiment dans le meilleur état toi. » Il hausse un sourcil. Tiens. Oui. Ce ton lui convient. Maintenant. Ah. Ouais. S'occuper de la porter dans un endroit un peu plus confortable. Peut-être ? Eh. C'est que cela ne ferait pas une bonne publicité si des personnes venaient à faire un quelconque lien entre le Cabaret et cette chose qui traîne au sol, là. Un soupir, qui traverse ses lèvres. Alors que le Loup Doré approche. Pour porter le génie de l'informatique. Ah, oui. Nous ne sommes pas dans le monde virtuel. Le réel. Avec ses conséquences. Plus complexe qu'un FMV. Et avec bien plus de possibilités.
Une silhouette, donc. Celle de T-Bug. Qui est portée pour s'enfoncer dans une ruelle. Et se glisser dans le bâtiment. Par l'entrée des artistes.

Après tout ! N'as-tu pas joué une belle comédie, aujourd'hui … T-Bug ?

***

Le canapé est plutôt confortable. Un léger parfum de café règne dans la pièce. Quelqu'un semble en avoir préparé. Un salon. Assez sobre, bien que confortable. Quelques échantillons de tissus sur une table – certains choix ne semblent pas encore avoir été réalisés. Mais cela ne saurait tarder, vu le peu de choix qu'il reste à faire. Ouverture imminente, après tout. Les fournisseurs sont prêts à envoyer les dernières commandes. Les employés, prêts à installer tout ce qu'il faut. Que ce soit dans la salle principale ou dans les autres pièces. De jeu. De musique. De douceur. Et d'autres réalités. Qui se mélangent dans cet établissement.

Le bruit d'une douche qui s'écoule. Aussi, le son d'une musique – c'est sans doute la première chose entendue à son réveil. Un tourne-disque, vinyle. Quelque chose d'ancien – de réellement, ancien – qui fonctionne encore. Des petits détails, comme ça. Des éléments fragiles, discrets. Qui associent dans une harmonie étrange, subtile, différentes époques. Comme pour faire de ce lieu – de ce salon, ou de plus ? - un lien isolé. Hors de tout.
Sur une table. Le téléphone de T-Bug. Ainsi que ses affaires. Correctement posées, comme si personne n'avait touché à quoique ce soit – ce qui est le cas. À côté, deux mugs. Une cafetière. Ah. C'était de là, le parfum. Puis. L'eau s'arrête. Quelques rapides minutes après, une porte s'ouvre.

« Ah. Enfin réveillée. » Son propre téléphone en main, Rune regarde l'heure. « Cela fait quand même deux heures. J'ai commencé à me dire si je ne devais pas appeler un médecin. » Avant d'aller prendre une douche, preuve de l'importance de tout cela. Un simple pantalon de coton sombre recouvre sa nudité. Pieds nus. Il avance, un peu. Serviette sur sa nuque. Un haut en main, qu'il n'a pas encore enfilé. Qu'il dépose même sur une chaise.
Avant de se pencher légèrement dans sa direction.

« Well. Tu es une petite chanceuse. » Ses yeux, bleus. Pour le moment, jouons un peu. Après tout, les communications sont souvent cryptées, pour que les voix ne soient pas reconnues. Autant en profiter. Juste un peu. « Café ? »