I : Le Bateleur
La mère de Kasumi vivait de la prostitution. Malgré cette situation peu enviable, elle accepta d'avoir un enfant dont elle ne connaissait pas le géniteur. Peut-être voulait-elle se créer un support mental pour continuer à vivre, peut-être voulait-elle que cet enfant soit le point de départ d'une autre voie. Kasumi ne fut pas un enfant difficile, il obéissait aveuglément à sa mère, même quand il devait se travestir, afin d'éviter d'avoir d'autres soucis avec des clients qui pourraient le trouver dans la maison. La mère de Kasumi était stricte, mais juste avec son enfant, ayant conscience que son métier n'était pas propice pour l'élever comme un enfant normal. Mais le jeune garçon s'adaptait, sa sensibilité à autrui étant suffisamment développé pour comprendre que le bien-être de sa mère dépendait de son obéissance et de cette mascarade quand les clients étaient présents.
En cours, il ne lésinait pas sur les efforts, apprenant l'anglais tout en ne reniant pas le japonais, sa langue natale. Ses notes étaient très bonnes, certains enseignants trouvant qu'il avait de quoi sauter une classe, mais sa mère s'y opposait, voulant que son enfant fasse toutes les classes, pour son propre bien et qu'il n'éprouve pas des difficultés avec la différence d'âge, en plus d'être étranger.
XII : Le Pendu
C'est à douze ans que tout vint à basculer. Kasumi avait reçu l'autorisation de sa mère pour fêter son anniversaire avec des amis, devant rentrer une fois cette fête terminée. Cela avait duré plus de temps que prévu, se dépêchant, à toutes jambes, de prendre les petites ruelles et rentrer. La porte était fermée et il prit la clé qui était cachée à l'endroit habituel. En ouvrant, il entendit des cris, se précipitant, sentant l'ambiance être dangereuse. Il vit un homme avec un couteau planté dans sa mère. L'homme jeta son arme vers Kasumi qui esquiva instinctivement, mais la lame vint à trancher profondément sa joue droite, se plantant dans le meuble derrière lui. Le jeune garçon n'eut pas le temps de réagir que la main saisit sa gorge, l'homme ouvrant la véranda et lâcha l'enfant dans le vide.
La chance voulut que cette chute du deuxième étage ne lui donna pas la mort, tombant dans l'inconscience sous le choc.
XIII : La Mort
Au réveil il était à l'hôpital, il comprit par l'attitude des adultes que ce n'était pas un cauchemar, ne voulant pas accepter que s'il retournait chez lui, il n'y aurait personne, se disant que c'était son insistance de fêter son anniversaire qui avait tué sa mère. Le reste de sa famille ne pouvait ou ne voulait pas voyager du Japon pour récupérer le rejeton d'un membre qui avait préféré s'exiler à l'étranger que rester sur l'île.
Pendant deux semaines il fut gardé à l'hôpital, son sommeil était court, envahit de cauchemar, son esprit réagissant telle une bête effrayée au moindre bruit, les médecins n'eurent d'autre choix que d'utiliser des calmant, afin que le stress contant ne vienne pas à malmener davantage le patient. Kasumi ressorti de l'hôpital avec deux séquelles physiques, une cicatrice sur la joue droite et une chevelure qui allait blanchir de façon permanente. Une chose n'avait cependant pas été prise assez au sérieux, son état mental . Les médecins ne pouvaient être à blâmer, Kasumi s'étant enfermé dans un mutisme.
Pendant ses deux semaines, il s'était mis à lire beaucoup, tentant de trouver dans cette lecture une forme de rédemption à sa faute.
N'ayant aucun membre de sa famille souhaitant faire le voyage du Japon à l'Angleterre pour le prendre en charge, la raison officieuse était qu'ils ne souhaitaient pas prendre en charge un étranger dont le père n'était pas connu, il fut placé en famille d'accueil. Ses notes en cours dégringolèrent, les enseignants signalant qu'il avait de nombreuses absences et qu'il ne s'intégrait plus comme avant en classe, s'éloignant de ceux qui cherchaient à se lier d'amitié avec lui. S'il parlait peu, il se montrait agressif quand on tentait de lui couper les cheveux ou masquer sa cicatrice. Pendant un an la famille qui l’accueillait tentait de le comprendre, avant de prendre rendez-vous avec une psychologue, cette dernière arrivant à le faire parler en faisant preuve de patience.
Elle put comprendre que le garçon Kasumi avait disparu depuis le drame, laissant place à une fille Kasumi, plus sensible que jamais à la notion de perte, d'où sa froideur, son mutisme, pour paraître repoussante. Kasumi n'avait aucune envie de changer son corps, encore moins d'effacer sa cicatrice, considérant cela comme son châtiment, la marque de son égoïsme qui avait coûté la vie de sa mère. Quand la psychologue questionnait sur ce que l'enfant ferait, il n'y eut aucune réponse verbale, ses yeux emplit de haine la formulant de manière silencieuse. Kasumi ne pouvait pardonner à cet homme.
Une fois mit dans la confidence, les parents adoptifs ne se sentirent pas prêts à pouvoir continuer à l'élever, Kasumi venant à s'exprimer pour les remercier de cette année sous leurs toits. Plusieurs familles tentèrent leurs chances, avant que Kasumi atteigne ses seize ans et tente de vivre par ses propres moyens. Son apparence avait grandement changé et parvint à trouver un boulot de livreuse. Kasumi commença à maquiller sa cicatrice pour qu'elle ne soit pas visible aux clients.
II : La Papesse
Pendant neuf mois, Kasumi n'eut pas de soucis, jusqu’à tomber sur un client. Son corps entier frissonna en entendant la voix, les regards se croisèrent et les cartes du destin se dévoilèrent. L'homme ne reconnut pas Kasumi, trouvant une femme aux cheveux blancs assez atypique, jouant le jeu en disant avoir une chevelure blonde, mais appréciant se les décolorer pour sortir du moule. Kasumi se retenait d'exprimer la haine qui consumait son être, partant en prenant un pourboire et en obtenant son numéro.
Par la suite Kasumi joua le rôle de l'adolescente rebelle voulant sortir avec des hommes matures, afin de faire rager ses parents, se retenant des frissons de dégoût quand l'homme montrait de l'affection.
L'occasion arriva une nuit, près d'une falaise. Kasumi profita de ce que l'homme tente de l'étrangler, certainement par plaisir de voir des femmes agoniser, pour sortir une dague et le planter dans l'estomac, Kasumi ayant un visage satisfait en voyant celui, surprit, de son agresseur. Le meurtrier recula de quelques pas, posant sa main sur son abdomen et constater qu'il saignait, alors que Kasumi passa son bras armé sur sa joue droite et dévoiler la cicatrice.
- Quatre années, il n'aura fallu au final que ce temps pour te retrouver.- Attend, tu pourrais me livrer …- à la police ? Je ne te laisserais pas partir vivant, même si je dois être souillée à vie pour cela.L'homme chargea Kasumi, sans doute par l'énergie du désespoir, la police surgit, criant de ne pas bouger. Kasumi se contenta d'esquiver, laissant le meurtrier être emporté dans son élan et tomber de la falaise, criant avant qu'un silence macabre ne plane pendant quelques secondes. Kasumi n'offrit aucune résistance lors de l'interpellation. L'ancien meurtrier était tomber l'équivalent de plusieurs étages, la tête la première, il n'y avait aucune chance de survie.
VIII : La Justice
Par la suite Kasumi eut son jugement, réfutant la folie, signalant que son côté féminin était à présent son identité. L'accusation d'une tentative d'assassinat fut retenue, mais la juge vint à tenir compte des antécédents et du mobile qui avait aboutit à ce geste.
Kasumi reçut une peine de quinze années, réduite à dix ans s'il n'y avait pas de mauvaise conduite pendant ce délai. Une interdiction formelle de détenir ou utiliser d'une arme, sauf cas avéré de légitime défense, ainsi qu'un suivit psychologique régulier. Kasumi accepta le verdict sans rechigner.
Quand la juge vint à demander ce que Kasumi comptait faire à présent, la réponse fut spontanée avec un visage radieux.
- Recommencer à vivre est un bon point de départ, non ?Le transfert fut annoncé, laissant un administré s'occuper de remplir le dossier de Kasumi.
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